Charte Des Valeurs

« Ils vont détruire notre identité »

Readers in English, may refer to Google for translation

Me. Marc Tremblay is a Montreal lawyer who is an active member of the Liberal Party of Canada.  This letter is his commentary on the controversial “Quebec Charter of Values”, currently put forward by the separatist Parti Québecois government before the Assemblée Nationale (the legislature of the Province of Quebec), which proposes to fully secularize the provincial state institutions by banning religious head-gear, such as hijabs, kippas and turbans among all state employees.  These would include all medical staff, teaching staff, daycare workers, bus drivers  and so on.  This action is widely interpreted as an aggressive move against religious rights and seen as a xenophobic gesture targeting religious minorities and immigrants.

Me Marc F. Tremblay, avocat, Montréal, 23 octobre 2013

« Ils vont détruire notre identité. Ils ne seront jamais loyaux car ils font passer l’église catholique avant tout… » (1)

New York, années 1840. Des milliers d’irlandais y immigrent. Cette arrivée massive bouleverse le système établi et la quiétude de ses habitants. Des propos ravageurs fusent et l’animosité envers ces nouveaux venus prend place. L’historienne Gretchen Sullivan Sorin dit : « On les appelait les noirs du  XIXième siècle. » (2) Peter Quinn, écrivain, ajoute « Aujourd’hui on a du mal à imaginer qu’un groupe d’immigrants blancs, chrétiens et anglophones ait été considéré comme une race à part incapable de s’intégrer aux États-Unis… » (3)

« Ils vont détruire notre identité »

Readers in English, may refer to Google for translation

Me. Marc Tremblay is a Montreal lawyer who is an active member of the Liberal Party of Canada.  This letter is his commentary on the controversial “Quebec Charter of Values”, currently put forward by the separatist Parti Québecois government before the Assemblée Nationale (the legislature of the Province of Quebec), which proposes to fully secularize the provincial state institutions by banning religious head-gear, such as hijabs, kippas and turbans among all state employees.  These would include all medical staff, teaching staff, daycare workers, bus drivers  and so on.  This action is widely interpreted as an aggressive move against religious rights and seen as a xenophobic gesture targeting religious minorities and immigrants.

Me Marc F. Tremblay, avocat, Montréal, 23 octobre 2013

« Ils vont détruire notre identité. Ils ne seront jamais loyaux car ils font passer l’église catholique avant tout… » (1)

New York, années 1840. Des milliers d’irlandais y immigrent. Cette arrivée massive bouleverse le système établi et la quiétude de ses habitants. Des propos ravageurs fusent et l’animosité envers ces nouveaux venus prend place. L’historienne Gretchen Sullivan Sorin dit : « On les appelait les noirs du  XIXième siècle. » (2) Peter Quinn, écrivain, ajoute « Aujourd’hui on a du mal à imaginer qu’un groupe d’immigrants blancs, chrétiens et anglophones ait été considéré comme une race à part incapable de s’intégrer aux États-Unis… » (3)

Y a-t-il une grande différence entre le New York d’alors et ce qui se passe actuellement au Québec, relativement au débat sur la Charte des valeurs? Déjà, se profilent à l’horizon ceux qui s’insurgent. Leurs voix toutes démocratiques s’élèvent. Elles clament tout haut « C’est une autre époque. Nous, nous sommes civilisés. On n’est pas du tout comme ça. Comparaison boiteuse.»

L’histoire nous enseigne beaucoup. Hélas! Nous ignorons fréquemment son enseignement et répétons trop souvent les mêmes ragots, les mêmes erreurs.

Ainsi, l’homme de religion juive qui porte sa kippa, nous heurte-t-il à ce point? Et le hassidique avec ses longues tresses?  Et le sikh qui est coiffé d’un turban? Et la religieuse catholique qui porte le voile, car il y en a encore, qui s’en indigne? Et les bérets blancs?

Ha ! Oui. Nous oublions les femmes de religion musulmane. Les« sceuses là » qui s’accoutrent de voile, hidjab ou burka ou autre. On entend dire : «  Celles-là, c’est pas pareil. Sont différentes. Ce n’est pas normal qu’en 2013 au Québec, que les femmes se couvrent au complet ou porte le voile. Ça me choque. Et en plus elles ne semblent pas s’intégrer. Je ne voudrais pas que mon enfant se fasse enseigner ou garder par une femme (musulmane en sourdine) qui a un signe religieux ostentatoire sur elle, car elle pourrait pervertir mon enfant. Ça va finir qu’on va se faire voler notre identité. Etc.» 

En réalité, nous sommes encore et toujours en crise identitaire, du moins c’est ce que l’on semble vouloir nous faire croire. Cette fois, elle est soutenue par le clairon de la laïcité qui est la panacée à tous les maux. Comme si le fait d’avoir une croyance religieuse est une tare. Alors pour régler cette crise, l’État est proactif. Voici la prescription : une Charte des valeurs.

Les justifications, telle la comparaison avec la France, ne reposent en définitive que sur un sophisme. Entre autres, nos histoires sont totalement différentes. Prendre la France comme exemple, c’est omettre son passé colonisateur et mettre en parenthèses la façon dont s’est produite l’immigration dans ce pays.

Quant au principe de l’égalité des hommes et des femmes, les Chartes des droits, tant celle du Québec que du Canada ne reconnaissent-elles pas cette égalité? Qui oserait remettre ce principe en question? Les femmes se battent sans cesse pour que l’égalité ne soit pas qu’un vague principe. Et les hommes doivent y concourir. Mais ce principe, si essentiel soit-il dans notre société, permet-il de réfuter le droit à une femme d’afficher ostentatoirement sa religion? Désirons-nous vraiment que l’État devienne le Grand sondeur ou inquisiteur de la profondeur des croyances religieuses? Est-ce la façon de créer cette égalité tant recherchée?

Il importe aussi de souligner que ce n’est pas par l’habillement que les intégristes de tout acabit réussissent leur tour de magie. Mais par la parole. La parole enjôleuse qui entre dans la tête d’un individu pour en faire un adepte d’une pureté extrémiste. Le passé fourmille d’exemples tous plus humiliants les uns des autres pour la race humaine.

À celles et ceux qui ont quitté leur terre natale pour devenir des citoyens à part entière du Canada, en général, et du Québec en particulier, nous disons merci d’être ce qu’ils sont. 

Le danger pour notre identité, n’est pas le voile. La croisade actuelle par contre….

Notes (1), (2) et (3): propos émis dans la série documentaire « Histoire de New York », réalisé par Ric Burns, épisode 2 « Ordre et désordre (1825 – 1865) »; les propos sont transcrits par l’auteur de la présente lettre.

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